Le premier entraîneur d’Antoine Dupont raconte “Toto”, l’enfant de Castelnau-Magnoac
Article extrait de la Depêche du Midi du 21/09/2023, recueilli par Olivier Fayard
Pour Antoine Dupont tout a commencé au sein du club de son village. Le Magnoac FC où le capitaine du XV de France a bluffé tout le monde dès ses premiers pas sous la houlette de Jean-Philippe Guerrero. Le Magnoacais a vu l’éclosion de celui qui est devenu l’un des meilleurs joueurs au monde. Il se souvient.
L’école de rugby du MFC : les « vrais » débuts
« On était quelques anciens du rugby de Castelnau-Magnoac avec pas mal de membres de sa famille à avoir des enfants. En particulier des garçons puisque le rugby chez les filles n’était pas aussi développé que maintenant ; ce qui nous a donné l’idée de relancer une école de rugby qui était en sommeil.
Dans le coin, il y avait surtout l’école de basket de Monléon-Magnoac où nos garçons, y compris les frères Dupont (Clément et Antoine) jouaient. Sportivement, ils avaient tous de bonnes qualités et les choses se sont faites naturellement quand on a relancé l’école de rugby. À l’époque c’était le Père Yves Laguillony qui était le président du club et le grand-oncle d’Antoine (Dupont) qui avait remis le MFC à flot en s’associant avec le maire, comme dans Don Camillo.
Nous, on est arrivé à point nommé en 2000-2001 pour remonter l’école du club avec des parents, le président actuel qui était joueur (Sébastien Bousquet) , etc. Et l’aventure a commencé avec Antoine jusqu’à ce qu’il parte à Auch en cadets ». Les premiers pas d’Antoine : « Il n’avait pas l’âge d’une licence » « On est allé faire du porte à porte pour attirer les gamins et on en a eu une cinquantaine sur les premières initiations.
Lors de l’une des premières journées de l’école de rugby supervisée par le comité départemental et sur un des premiers exercices, je prends le truc en main en donnant les premières consignes de passer en arrière et d’aller marquer là-bas. Antoine qui n’était pas plus haut que trois pommes, prend le ballon et part marquer tout seul et tout le temps. Déjà il avait des attitudes qu’on a dû canaliser en donnant des consignes pour qu’il donne le ballon aux autres. Et il n’avait pas encore l’âge de faire une licence, tout juste 5 ans. On le prenait, sinon il aurait tout cassé chez lui ! (rire) ».
Prédispositions rugbystiques : « Antoine avait le petit truc en plus »
« Disons que par rapport à nos enfants et plusieurs ont joué à haut niveau en Crabos à Auch, notamment, ou même par rapport à son frère, lui avec 1 an de moins avait déjà un petit truc en plus. Il était adroit, intelligent hors et sur le terrain. Il trouvait toujours la faille en étant malicieux. Au début, on pouvait le considérer super bon et il nous a bluffés pendant 10 ans à l’école de rugby. »
Le jeu : « Antoine était un leader du jeu »
« Antoine était un élément moteur, un leader et naturellement il jouait soit demi de mêlée ou d’ouverture. Il puait le rugby et c’était le meneur dans le jeu. Pas forcément dans le caractère où il était un peu plus dans le groupe. Il n’a jamais été en retrait, toujours compétiteur et toujours avec le respect des adultes, de ses équipiers ou de ses adversaires. Râleur bien sûr.Mais, notre politique n’était pas forcément la gagne alors on l’a parfois sacqué et jamais mis dans le confort. On lui a mis quelques barrières et j’ose espérer que ça lui a rendu service. » “On ne réalise pas. Aujourd’hui un peu plus car on le voit à la télé avec le gratin.
La progression : « Avenir tracé »
« On voyait bien qu’il était au-dessus. Comme on était en entente avec Lannemezan, on était obligé de muter nos jeunes sauf trois qu’on pouvait garder sous tutorat. Lui, on l’a gardé au club du fait qu’il y avait des indemnités de mutation. Faibles mais on savait déjà qu’il allait partir en cadets (16 ans) vers de plus grands clubs. Et on l’espérait comme c’était le cas pour les autres bons jeunes joueurs qu’on a pu avoir. Mais pour Antoine, l’avenir était tout tracé. »
Les premiers copains : « 80 % de chance de le trouver au stade »
« Il a toujours eu son noyau de copains. Mes enfants, Kévin et Maxime, Gaëtan, Fabien, Guillaume, etc. Des jeunes de Castelnau-Magnoac avec qui Antoine faisait tout. Après l’école primaire, ils sont partis ensemble au collège de Garaison puis au lycée Beaulieu à Auch. Tout jeune, comme dans tous les villages, les gamins avaient une certaine liberté. Après, on n’était pas embêté car quand on ne savait pas où ils étaient, on allait au stade et on avait 80 % de chances de les trouver. Ils étaient soit sur le vélo, soit avec le ballon ! »
Antoine Dupont a failli jouer au football : « Il aurait été doué »
« C’était une simple discussion avec sa maman car les copains de rugby d’Antoine allaient changer de catégorie. Lui, avec un an de moins allait se retrouver deuxième année. Mais, à l’époque on avait le droit de surclasser un joueur par école de rugby. Donc, on a surclassé Antoine pour qu’il reste avec ses copains du rugby. Car, on ne parlait pas de carrière ou autre mais de plaisir. Il aurait pu faire du football pour rejoindre d’autres copains et il aurait été doué ».
Le garçon : « Un comportement hyper sérieux »
« Il était intelligent mais surtout hyper sérieux et bosseur. Le talent c’est une chose, mais il y a quand même le travail. Antoine s’est entouré d’un groupe de copains d’ici et d’Auch qui font complètement partie de sa vie. J’ai vu des soirées festives où beaucoup de ses copains se mettaient « cartable » mais lui, c’était toujours très modéré car il y avait des échéances. Ça a toujours été quelqu’un de sérieux ».
Le départ du Magnoac FC : « Une équipe de dingues à Auch »
« Il y a eu les sélections jeunes et Antoine était connu dans le comité Armagnac-Bigorre. Repéré depuis un moment mais il a suivi son frère, Clément, qui est parti le premier au lycée Beaulieu à Auch car il y avait une structure rugby élite avec le club de la ville. Nous, on ne faisait pas attention mais les gamins le savaient que c’était une super filière plusieurs fois championne de France UNSS, Agricole, à 7, à 15, etc. Ils gagnaient tout avec Anthony Jelonch, Gauthier Doubrère (Castres), Théo Thierry (Auch). Il y avait une équipe dingue pour un lycée et les jeunes d’ici, son frère, ses deux cousins, un de mes fils et d’autres amis sont partis dans la filière S du lycée agricole d’Auch. Nous, les parents, on les conduisait partout et on assistait aux matchs. ».
Antoine Dupont, star mondiale : « Pour nous, il reste Toto »
« On ne réalise pas. Aujourd’hui un peu plus car on le voit à la télé avec le gratin. Mais, pour nous, il reste « Toto ». On l’a vu grandir, évoluer… c’était assez banal. En plus, il est resté attaché à son terroir et ses copains. On se croise au village ou au stade, mais on le laisse tranquille car il vient chez lui pour se ressourcer. Avec mon épouse Dominique, on le verra de loin, jeudi soir, car on sera à Marseille pour encourager l’équipe de France ».